L'envol du moineau, Amy Belding Brown

 Massachussetts, 1672. Mary Rowlandson, bien qu’épouse de pasteur et donc très au fait des mœurs puritaines, se lie d’amitié par hasard avec une toute jeune fille qui vient d’accoucher d’un garçon hors-mariage. Pire, pour les bien-pensants, la jeune Bess a eu son bébé avec un jeune esclave, Silvanus. Pour regagner sa place au sein de la communauté, Bess est donc supposée s’excuser publiquement et renoncer à son enfant. Mais bientôt, la communauté est attaquée par une tribu indienne : Mary est enlevée au milieu d’une violence inouïe et voit certains membres de sa famille périr sous ses yeux. Désormais captive des Indiens, elle va cependant peu à peu s’accoutumer à un mode de vie et un mode de pensée différents, elle qui sait naturellement faire preuve de curiosité et d’ouverture d’esprit. 

Mary a quitté l’Angleterre encore enfant aux côtés de sa famille, lors de la migration des puritains, pour venir s’établir en « Nouvelle-Angleterre », en Amérique du Nord. Dans cette société austère, pleine de règles strictes mais paradoxalement, criblée aussi de superstitions, Mary semble à part : en bonne dévote, elle connaît les règles mais s’interroge vite sur le bien-fondé de celles-ci. Son expérience de la captivité va changer radicalement son regard sur la vie qu’elle menait jusqu’alors. 

 Malgré l’horreur de sa situation, la perte des siens, la faim et le froid, Mary goûte à une plus grande liberté de mouvement ; elle noue un contact authentique avec la nature et découvre, derrière des coutumes apparemment différentes des siennes, des sentiments universels et même parfois plus vrais parce qu’ils ne sont pas entravés par les conventions sociales imposées par la société puritaine, comme la liberté de manifester son affection à de jeunes enfants. Elle découvre aussi la solidarité et la tolérance dans une communauté où les femmes ne sont pas reléguées au second rôle. 

J’ai tout de suite été touchée par l’écriture très immersive, qui fait appel aux cinq sens, à la puissance évocatrice  : 

« La bouche de la fille s’ouvre pour laisser échapper une plainte animale. C’est le son des os raclant des rochers brisés, le son du vent d’hiver se déchaînant dans les forêts désolées ; il évoque à Mary la glace recouvrant le seuil d’une maison ravagée par les flammes. » (p. 20)

 La plupart des personnages évoqués ont existé ; il s’agit de l’histoire romancée de Mary Rowlandson qui s’appuie sur le témoignage de Mary elle-même ainsi que sur d’autres sources historiques. 

***

Les superstitions auxquelles n’échappe pas la communauté de Puritains :

« Le placenta doit être expulsé et le cordon ombilical coupé, et à la longueur parfaite : il ne doit pas toucher le sol, auquel cas le garçon ne sera pas capable de contrôler sa vessie. Deux œufs doivent être cassés et mélangés sur des braises pour forme un cataplasme, qui, appliqué sur le corps de Bess, garantira sa fertilité future. Après quoi elle devra manger un œuf poché et allaiter le bébé. » (p. 22)

 ***

« Le soir, Mary regarde Weetamoo dénouer ses tresses et les secouer afin qu’elles se déroulent et coulent le long de son dos, jusqu’à sa taille. Elle plonge les doigts dans un pot d’onguent et passe plusieurs fois les mains dans ses cheveux qui, bientôt, scintillent à la lumière du feu. Puis elle les coiffe à nouveau en deux tresses brillantes. » (p. 136)

 ***

« Mary ramasse du bois, puise de l’eau, racle les peuax de bêtes et broie le maïs sur une pierre. Elle s’occupe du feu, cherche des noix et des baies. Elle répare les grandes nattes qui doublent l’intérieur du wetu, tressant du jonc et du chanvre à l’aide d’une aiguille à double pointe taillée dans la côte d’un cerf. Elle met à fumer de la viande d’écureuil et balaie le sol en terre du wetu avec une branche de pin plusieurs fois par jour. Son esprit s’affûte à mesure qu’elle se défait de son chagrin. »

Le trailer des éditions du Cherche-midi :

La bande-annonce de Saints and Strangers, une mini-série en deux épisodes qui se déroule cinquante ans avant le roman, au temps des premiers colons dans la baie du Massachussets. 

 Première participation au mois américain en cours sur instagram chez lamousme.